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Etude du lexique
Disti nguez
Changer—devenir différent, être transformé: Le baromètre baisse, le temps va changer.
Se changer — mettre d'autres vêtements : Tu es toute mouillée, va te changer.
Remarque. Le verbe changer se conjugue avec être si l'on veut insister sur l'état résultant du changement :
// est bien changé, le l'ai reconnu avec peine.
Glisser — se déplacer sur une surface lisse: Les enfants s'amusaient à glisser sur la rivière gelée. Il a glissé et s'est fait mal au bras.
Se glisser — pénétrer quelque part d'une manière adroite ou rapide : // s'est glissé dans sa chambre sans être aperçu par sa mère.
Risquer: 1. Risquer qch, l'exposer à un risque, à un danger: En essayant de sauver un enfant, il risquait sa vie. 2. Risquer de faire qch : Ne vous penchez pas par la fenêtre, vous risquez de tomber.
Se risquer à — se hasarder à dire ou à faire: Je ne me risquerai pas à lui faire des observations sur sa conduite.
Retenez
Assumer qch — prendre à son compte, se charger de : II a été obligé d'assumer cette lourde tâche.
S'entendre à, s'y connaître en qch — être très compétent en la matière : // paraît s'entendre à la musique moderne. Ils s'y connaissent en antiquités.
Remarq ue. On peut employer aussi le verbe connaître à avec une négation : II ne connaît pas grand-chose à la peinture. Il n'y connaît rien.
Former qn — lui donner un enseignement particulier, développer en lui certaines aptitudes : Dans cette école professionnelle on forme bien les élèves.
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Chose /—toute sorte d'objet matériel ou d'abstraction. Ce mot peut être employé à la place d'un nom quelconque, d'un être inanimé : On m'a raconté une chose amusante = une histoire, un fait. Attention aux prépositions
Complimenter qn sur qch ou pour qch: La mère a complimenté sa fille sur son costume de Noël. Le professeur a complimenté ses élèves pot'r leur succès à l'examen.
Négliger qn, qch : Ces derniers temps il négligeait ses affaires.
Nuire à qch, à qn : Cet incident a beaucoup nui à sa carrière. Sa paresse lui nuit beaucoup.
Sous prétexte de : // est parti sous prétexte d'un travail urgent.
Noël et françois schoudler
Lorsque Noël Schoudler revint d'Amérique aux premiers jours d'avril, il était rajeuni, transformé, II débordait de projets et'd'enthousiasme, parlait de repartir à l'hiver pour l'Argentine, l'année suivante poui la Scandinavie. Il vit à regret ses malles monter au grenier.
— On est stupide, déclarait-il; on se confine dans de vieux bureaux et de vieux principes, alors que le monde est plein de richesses et de possibilités nouvelles !
François était enchanté de retrouver son père en si bonnes dispositions.
La première semaine, Noël donna dans les immenses salons de l'avenue de Messine une réception où Paris s'écrasa.
Le géant voyait venir tout le monde à lui, et faisait largement profiter ses hôtes de ses expériences, avec une faconde d'explorateur. Il donnait aux parlementaires présents une leçon de politique extérieure, conseillait à un jeune peintre d'exposer à New York, s'apitoyer devant les industriels sur la misérable organisation de la production îran-, çaise. «Ils ont là-bas ce qu'ils appellent le système Taylor...» En même temps, il interrogeait chacun comme s'il eût été absent depuis deux ans,
On disait de lui :
— Il est étonnant, Schoudler. On ne croirait jamais qu'il a soixante-six ans ! C'est un roc.
Le lendemain, il se remettait au travail.
Le premier de ses collaborateurs qui lui dit : «Pour cette question, je réglerai cela avec M. François Schoudler», lui porta un coup. Jusque- 1 là, c'était lui, Noël, qui conseillait: «Voyez donc cela avec M. François.» Vainement d'ailleurs, car par une vieille habitude, les dossiers, les problèmes, refluaient automatiquement vers son bureau.
Pendant ces deux mois, les choses avaient changé. Noël s'aperçut qu'à la banque on appelait François « le baron Schoudler, le jeune », et qu'au journal, les membres du personnel qui avaient moins de trente-cinq ans avaient pris le pli tout naturellement de s'adresser à François en lui disant «patron».
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Dans la salle de rédaction, il y avait au mur une caricature de François éteignant son allumette du geste large qui lui était familier. Noël Schoudler dit :
— Ce n'est pas très remarquable.
Et il constata que quelques rédacteurs paraissaient mécontents de sa réflexion.
Sa situation de propriétaire d'une grosse banque privée et de régent de la Banque de France interdisait à Noël Schoudler d'être en nom dans le journal autrement que comme principal commanditaire. Mais en fait, il y assumait toutes les fonctions de directeur, y passait plusieurs heures chaque jour, s'occupait de tout. Les autres banquiers jugeaient avec quelque dédain cette manie du journalisme et la considéraient comme un violon d'Ingres un peu trop sonore. Pour Noël, le journal était sa création, sa joie, l'expression visible et quotidienne de sa puissance, sa machine à faire saluer les ministres.
Pendant son absence, «L'Echo du Matin»avait monté de seize mille numéros à la vente. François avait fait introduire des modifications dans la mise en page, dans la disposition des rubriques, dans la présentation de la publicité.
Fier de lui, et certain d'avance des félicitations de son père, il dit:
— J'ai voulu faire une expérience partielle. Je suis sûr qu'avec un léger effort, nous pouvons faire monter de pius de trente mille.
—- C'est une erreur, c'est une erreur ! répondit Noël. On ne fait pas d'expérience avec un vieux journal. Tes trente mille nouveaux lecteurs risquent, dans les six mois, de nous en faire perdre soixante mille de notre ancienne clientèle.
Se rendant compte, tout de même, que François avait raison, il ajouta :
— Laissons ce que tu as fait, il ne faut pas changer tout le temps ; mais ça suffit comme cela.
Tout le bel esprit novateur qu'il avait rapporté d'Amérique était déjà tombé. Il n'était plus question de système Taylor, et il semblait que ce fût François qui, sans avoir bougé, fût allé dans le «Nouveau Monde ».
Les amis et les flatteurs, pour faire plaisir à Noël, le complimentaient sans arrêt sur son fils.
— Oui, oui, il est très bien, François, j'en suis très fier, répon dait-il. D'ailleurs, je l'ai formé à mon école, comme mon père avait fait pour moi. Je lui ai passé les principes Schoudler.
Et son regard se faisait plus mince sous les paupières grasses, et on avait l'impression de s'adresser à une forteresse.
Le géant devenait plus morose de jour en jour, plus sombre, plus brutal; il s'en apercevait et ne comprenait pas pourquoi. «Ce voyage a dû me fatiguer», pensait-il. Il avait sans cesse l'impression qu'on le respectait moins; il se regardait dans les glaces.
Le conflit éclata au journal, et pour une raison très secondaire :
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pour Simon Lachaume. Le principal chroniqueur de politique étrangère; étant mort, François en profita pour proposer Simon.
— D'abord, quelle nuance politique a-t-il, ton Lachaume? demanda Noël, aussitôt mal disposé. Et quel âge? ... Trente-trois ans?
Sa main s'abattit sur le bureau. Il cria :
— Un gamin ! encore un gamin ! Si je te laisse faire, cette maison va devenir une nursery !
— Mais quel âge avait le père Bonnétang quand tu lui as donné la rubrique? répliqua François vexé.
— Le père Bonnétang, comme tu dis, avait mon âge ! c'est-à-dire, à ce moment-là...
Noël Schoudler sentit qu'il glissait sur un mauvais terrain car Bonnétang écrivait à « L'Echo du Matin » depuis près de trente ans.
Et puis, Bonnétang connaissait son métier! Et puis d'abord, c'est encore moi le patron ici, nom de Dieu ! et quand je dis non, c'est non !
Mais naturellement, c'est toi le patron, dit François avec calme.
Ce n'est pas si évident que cela! cria Noël. «Monsieur François» par-ici, «Monsieur François» par-là... «Monsieur François» a un plan pour le journal; «Monsieur François» a un plan pour les sucreries de Sonchelles; «Monsieur François» voudrait faire reconstruire l'immeuble de la banque! «Monsieur François» a un père et un grand-père qui travaillent, qui luttent, qui se battent comme des chiens depuis soi xante-dix ans pour le faire ce qu'il est...
Il perdait son contrôle. Ses paroles sortaient comme des mouchoirs noirs de la bouche d'un prestidigitateur. Il négligeait la présence du rédacteur en chef, ou plutôt il s'en servait pour nuire à son fils, dût-il en même temps se nuire à lui-même. Il devenait grossier de sentiment et de ton...
—... et «Monsieur François» qui ne connaît rien à rien, car tu ne connais rien à rien, tu comprends ! sous prétexte qu'il a été un foutri-quet de petit capitaine de cavalerie avec ses bottes payées par papa, avec sa Croix de guerre payée par papa, comme le reste...
Ah ! ça non ! Je ne permettrai pas ! s'écria François. Ma blessure aussi tu l'as payée? Nous ne nous sommes pas fait démolir la peau pendant que vous foutiez tous le camp à Bordeaux pour...
Tais-toi I hurla le géant.
Sa voix traversait les portes capitonnées et s'entendait jusque dans le bureau des secrétaires.
Le rédacteur en chef, fort gêné d'assister à cette scène, fit une timide intervention.
Ecoutez, patron, dit-il.
Ah ! vous, Muller, fermez-la ! cria Noël Schoudler. Sinon je vous fais sauter aussi ! J'interdis dorénavant que mon fils donne aucun ordre dans le journal ; vous m'entendez bien ? aucun ! Il n'a plus rien à y faire. Qu'on attende que je sois mort pour foutre mon œuvre par terre !
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II entendait son cœur battre avec bruit de machinerie de bateau. Il se souvint de son angine de poitrine, s'arrêta net de crier.
— On n'aura d'ailleurs peut-être pas longtemps à attendre, dit-il d'une voix subitement sourde... Allez! ... allez-vous-en! Va-t-en, Fran çois. Va-t-en... Je te demande de t'en aller.
Il haletait après la fureur, économisait ses mots, se comprimait le torse avec la main.
— Voilà... voilà tout le beau résultat..., ajouta-t-il.
Il s'allongea, énorme, sur le canapé de cuir, dégrafa son col, fit venir Lartois qui lui déclara, après l'avoir ausculté, qu'il avait un cœur de jeune homme et que ce n'était qu'un peu de surmenage.
D'après M. Druon, Les grandes familles